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Mode : Arturo Obegero, à la conquête de Paris

C’est salle pleine, ce jeudi 20 juin, au cinéma parisien Le Silencio des Prés (6e arrondissement). Le créateur espagnol Arturo Obegero y présente sa collection printemps-été 2025 dans le cadre de la fashion week masculine, sous la forme d’un mini-film de douze minutes. Un format idéal tant son univers est cinématographique. Sur l’écran, sa collection pour hommes et femmes baptisée « El amor brujo » (« l’amour sorcier ») s’anime avec éclat. Elle est inspirée du ballet espagnol éponyme (1915), composé par Manuel de Falla.
Incarné par des danseurs dont les mouvements empruntent au flamenco, le vestiaire est scénographique au possible, avec de la dentelle rouge qui s’échappe du col d’une blouse pour monter dans le cou, créant un effet de flammes, des pantalons de matador en soie solidement fixés à la taille avec des corsets, ou encore des ensembles vestes et pantalons noirs impeccablement coupés. Les pièces du quotidien se drapent également de cette aura théâtrale, tel ce blouson bomber rouge sang recouvert par une dentelle noire délicate.
La spécificité de cette collection ? Elle a été entièrement créée sur iPad. Un usage encore peu courant chez les créateurs de mode, le crayon et le papier ayant toujours la cote chez les designers. « C’est un outil qui m’a ouvert de nouvelles perspectives, s’enthousiasme le tout juste trentenaire. Dessiner traditionnellement les silhouettes me prenait beaucoup trop de temps. Là, c’est simple, rapide et intuitif. » Pourtant, le diplômé de l’école Central Saint Martins de Londres ne fait pas dans la simplicité. Ses silhouettes grandiloquentes se parent de dentelle morcelée, de Lurex brillant, de velours mat ou encore de soie délicate.
Installé à Paris depuis 2018, il a grandi sur la côte des Asturies (Espagne), dans la commune de Tapia de Casariego, 3 600 habitants. « C’est un tout petit village. Dans ma classe, au lycée, nous étions cinq élèves ! C’est un endroit connu pour le surf. D’ailleurs, dans ma famille, tout le monde le pratique, sauf moi ! », s’amuse-t-il. Lui, c’est vers la danse qu’il se tourne, avec une prédilection pour le flamenco. De là naît son amour du costume et du vêtement. Il lance la griffe qui porte son nom en 2020, en pleine période de confinement, et continue de travailler dans son appartement de Montreuil (Seine-Saint-Denis).
Si sa mode est mixte, il confesse préférer présenter son travail pendant les semaines de la mode masculine, pour une plus grande visibilité, car moins de marques y sont présentes. Et sa vision de l’homme est résolument celle de son époque, qui s’affranchit du genre. « Les vêtements ne sont pour moi rien d’autre que des pièces de tissu que l’on assemble. Peu importe qui les porte, homme ou femme. On n’a pas besoin de leur donner une connotation particulière. »
Dernièrement, son travail si singulier a tapé dans l’œil de deux femmes. Et pas n’importe lesquelles : les chanteuses Beyoncé et Adele ont chacune porté sur scène l’une de ses créations, en 2023. Deux robes de diva, tout en drapés et velours. « Ces projets spéciaux m’incitent à aller vers une création plus couture, plus façonnée pour les tapis rouges », ajoute-t-il. Celui qui a travaillé chez Lanvin lors de son arrivée à Paris confesse également son souhait de rejoindre, un jour, une grande maison française. « C’est à Paris que tout se passe. Les maisons au riche héritage m’intéressent énormément. Je m’imagine déjà m’immerger dans des archives extraordinaires ! » A bon entendeur…
Maud Gabrielson
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